« Tu pars encore? »


Oui. Voyager ne se réduit ni à l’aller ni au retour, c’est un événement qui affecte l’être jusqu’à la moelle, qui remet forcément tout en perspective, qui laisse des traces. J’aime bouffer du pays par les yeux et les mains, comme une nécessité, et y voir la rencontre humaine comme l’essence même de la vie. En voyage, on est projeté vers l’autre, l’ailleurs, la diversité, mais aussi profondément vers nous-mêmes. C’est souvent à mille lieues de chez soi qu’on se découvre : voilà pourquoi j’aime voyager.


« Tu es chanceuse de voyager autant! »


Chanceuse? Je crée plutôt ma chance. Et surtout je fais des choix. Le voyage me procure des bienfaits inestimables : se déconnecter de ma vie quotidienne, répartir autrement mon temps, prendre du recul par rapport à notre monde, briser les chaînes mentales créées par les habitudes, se laisser porter par les découvertes.


« T’as donc ben de l’argent! »


La perception du voyage se résume souvent au produit de luxe. Or il n’en est rien. Moi, je n’ai jamais disposé de fortunes pour globetrotter mais j’ai toujours été en constante mouvance. C’est devenu une priorité. Et avec le temps et l’expérience, on trouve des trucs au passage pour économiser un brin (mais s’enrichir au cube) : faire de la coopération internationale, de l’aide humanitaire et accompagner des groupes dans des programmes d'échanges interculturels.






« Tout homme est tiraillé entre deux besoins. Le besoin de la Pirogue, c’est-à-dire du voyage, de l’arrachement à soi-même, et le besoin de l’Arbre, c’est-à-dire de l’enracinement, de l’identité. Les hommes errent constamment entre ces deux besoins en cédant tantôt à l’un, tantôt à l’autre jusqu’au jour où ils comprennent que c’est avec l’Arbre qu’on fabrique la Pirogue. » - Mythe mélanésien de l’Ile de Vanuatu



J’ai fait de la pirogue pour atteindre Avlo, du long tail boat sur la Chao Phraya, du voilier dans les San Blas, j’ai enjambé une zemidjian à Grand-Popo, emprunté de nombreux taxis à Beyrouth, monté un éléphant à Chiang Mai, un cheval dans la Vallée de Caldera et un âne à Petra … J’ai parcouru l’île d’Utila en cart de golf, fait du tuk-tuk à Copan Ruinas et du quad sur la playa San José, j’ai embarqué dans une boîte de pick up à Panajachel, fait du moto-taxi à Jacmel et du vélo à Bocas del Toro, pris le train à Rabat et le ferry à Koh Chang … J’ai visité Douz à dos de dromadaire, utilisé le RER à Paris et le métro à Montréal, le Skytrain à Bangkok, les Jeepneys colorés à Manille, j’ai bravé les guaguas bondées à Sanchez et j’ai été malade dans un tro-tro à Accra … J’ai grimpé jusqu’au sommet des Pics de Sindou, marché ma vie sur la Salkantay Trail, erré dans les rizières balinaises, sillonné le canton de Luzern en autocar et quadrillé à pied les rues de San Andrés.


« Hein! Tu as fait tout ça? »


Oui. Et je m’en rappelle parfois la liste doucereuse. Et je revisite avec sourire ma mappemonde à la maison sur laquelle j’appose - au sortir de chaque expédition - une nouvelle pin de couleur. Et chaque année j’ajoute des villes sur mon profil TripAdvisor. Non pas pour que mon entourage s’ébahisse et clame « Wow! » mais plutôt pour entendre « Moi aussi je vais le faire » et propager ainsi le Virus du Voyageur.






Pour installer un côté rigolo à mes voyages, Jildor-le-peintre m’accompagne à chaque périple. À l’instar du nain de jardin d’Amélie Poulain, mon schtroumpf-artiste est photographié en divers endroits et les clichés sont partagés

Enseignante de français, globetrotteuse invétérée, passionnée des rencontres humaines, habitée par le mouvement, elle respire la vie.